Je ne fais pas un concert ou un masterclass sans citer les noms de Chet Atkins et Jerry Reed. Ce sont, pour moi, les hommes qui ont su donner sa plus grande expressivité à la guitare. Je pourrais en parler des heures mais un petit schémas valant mieux qu’un grand discours, je préfère vous indiquer quelques disques où leur génie est particulièrement éclatant.

   En ce qui concerne Chet Atkins :

   Edité en 1968, c’est un disque avec une véritable unité. Les arrangements sont caractéristiques du talent unique qu’avait de donner l’impression que toutes les mélodies ont été écrites pour la guitare. Au demeurant, on y sent les toutes nouvelles influences de Chet à cette époque : celle de Lenny Breau dans une façon inédite d’utiliser certaines harmonies, et celle de Jerry Reed dans sur l’utilisation des cordes à vide. Quant au son, c’est Chet dans toute sa splendeur. Pour moi, une grande référence pour ce que doit être un album instrumental….L’album n’a pas, à ce jour, été réédité en CD mais dans les années 70, Marcel Dadi et RCA avait fait presser une version française de cet album que l’on peut parfois trouver chez les disquaires faisant de l’occasion….

Superpickers

   L’exemple même du fait qu’un grand disque de guitare peut faire la part belle aux autres instruments : la fine fleur des musiciens de Nashville de l’époque (1973) vient répondre à la virtuosité de Chet. Des arrangements et des chorus en béton, un grand son…en bref Chet Atkins ! Cet album a été réédité en CD par le label BMG.

   Pour Jerry Reed:

   Ca c’est l’album du groove : c’est blues, c’est rythm and blues, c’est country et jazzy Il chante comme un fou et ses riffs de guitare vous mettent par terre. Tout ça en 1967…  

    Un exemple éclatant de la démarche unique de ce génie : des arrangements exceptionnels par leur originalité, un Jerry Reed qui s’impose par sa virtuosité guitaristique, le mélange des genres qui vont du bluegrass au jazz et un travail vocal superbe. Magique…

    Deux albums sortis à trois ans d’intervalles où les deux hommes, en toute simplicité, jouent comme à la maison : une imagination et un groove unique dans un album où transpire l’admiration mutuelle des maîtres. C’est unique et inégalé à ce jour...

Mais la jeune génération est aussi là en la personne de Brent Mason:

    Fan de Jerry Reed, Brent Mason est aujourd’hui « le » guitariste de studio à Nashville et, pour moi, un des plus grands au monde toutes catégories confondues.. Je l’ai découvert en regardant une cassette vidéo où avait enregistrée une émission qui s’appelait « American Music Shop », où Chet et Jerry jouaient, entourés de nombreux musiciens pour faire la promo de leur troisième album commun, « Sneakin’ Around ». J’ai alors vu un guitariste prendre un chorus de trente secondes sur Telecaster et aligner une idée de génie toutes les demi-mesures. J’étais tombé par terre et ai du ramper jusqu’à mon téléphone pour appeler Pierre Danielou, encyclopédie vivante (plus ou moins selon les heures) de tout ce qui touche à la guitare dans le monde. C’est lui qui m’a indiqué qu’il s’agissait de Brent Mason, que j’avais en fait déjà entendu dans ma vie puisqu’il participait au disque »Stay Tuned » de Chet en 1985.

   Cet album révèle l’immense culture et technique du bonhomme, toujours de bon goût, efficace en toute circonstance, genre rouleau-compresseur pour ego de guitariste… 
   En 2001, j’ai eu l’immense chance de voir Brent jouer à Nashville avec Paul FRANKLIN au pedal-steel, Eddie BAYER à la batterie et Michael RHODES à la basse. J’en rêve encore la nuit…
   Cet album n’est pas distribué en France mais je crois qu’on peut se le procurer en passant par le site officiel de Brent… 

   J’ai eu la chance de travailler avec les immenses guitaristes que sont Jim Nichols et Tommy Emmanuel. Tous deux ont une belle discographie à leur actif.

   A ceux qui ne connaissent pas encore Jim Nichols, j’aurais tendance à conseiller deux de ses albums :

  Dans « Save Your Love for Me », il donne la réplique à son épouse Morning, formidable chanteuse. Tous deux affichent leur éclectisme, Jim faisant la facile (pour lui !) démonstration de sa maîtrise du fingerpicking mais aussi du blues, du jazz et de la bossa nova. 

«  Jazz & Country  » est l’unique album solo de Jim NICHOLS. En l’écoutant, Chet Atkins en avait dit : «C’est un des meilleurs disques que j’ai jamais entendus ! » Lorsque l’on sait combien de disques de guitare il avait du entendre dans sa vie….
   Toujours est-il que l’immense culture musicale et technique guitaristique de Jim y éclatent et on en prend plein les oreilles.

   Chez Tommy Emmanuel, je retiendrai:

Can’t Get Enough
   Tommy m’a confié un jour que le budget en avait été impressionnant…et ca s’entend ! L’esprit de l’album rappelle pas mal certaines productions de Larry CARLTON, que l’on ne manque pas de retrouver aux côtés de Tommy dans certains morceaux. Chet est là également. Etonnant non ? 
   Le son est superbe et ca groove du feu de Dieu !

   Tommy EMMANUEL est certainement des plus grands maîtres de la guitare acoustique et l’album « Only », qu’il a enregistré en solo, démontre parfaitement cette caractéristique Les compositions sont souvent belles et le son grandiose.